Cérémonies civiles personnalisées

C’était il y a un peu plus de 40 ans : j’étais minot et le 1er souvenir que j’ai de toi, c’est ton sourire, dans ton salon, devant ta chienne qui donnait à téter à des petits chatons.

A hauteur de môme, je trouvais l’endroit étonnant, différent de ce que je connaissais, et cette générosité animale marquait le début de bien d’autres partages.

Jean-Luc, tu es à la fois un copain et la famille. Le fait que tu n’aies jamais opposé les deux pour me laisser prendre le meilleur de l’un et de l’autre en dit long sur ton personnage.

Choisir : défendre les Lip et vendre des montres pour financer les grévistes.
Décider et initier ce qui te va à chaque étape de ta vie : retaper une ferme où chacun a sa place et créer un funérarium à M…, pour faire la tienne.
Partager avec celles et ceux qui t’aiment : des valeurs, des moments, des engagements et des prises de becs.
Rendre possible grâce à ce degré épatant de liberté individuelle.
Rendre concret en mettant en commun tout ce qui peut l’être.

C’est bien plus que du talent donné par une bonne fée qui se serait penchée sur ton berceau, c’est une vraie détermination, forgée par un haut niveau de conscience :

• individuelle de celui qui choisit et assume.
• collective, politique, humaniste, altruiste, de celui qui partage.

Depuis 40 ans je suis admiratif de ce libre élan de soi, cette énergie vers les autres.
De ces choix individuels portés ensemble, par votre tribu si singulière, tellement plurielle.
Il en faut de l’engagement pour porter vos choix.
Il en faut du respect pour aller à l’essentiel en prenant chacun en compte.
Et au moins autant d’amour pour que ça réussisse pas si mal.

Pour créer un équilibre à la Dague, tu aurais pu céder à la tentation du repli sur soi, au nom de la différence. Mais ton souci des autres, ton engagement local et municipal, ta capacité à faire bouger les lignes en dit long sur ta volonté : tu ne t’es pas contenté de t’opposer, tu es allé chercher ce qui te parait juste. Et quand ça n’existait pas encore, et bien tu t’y collais.

Il n’y a pas si longtemps, je suis tombé sur ta voix en allumant France Inter pour le jeu d’Emile. Heureusement, tu as raté de peu le banco, sinon j’aurais dû payer ta prime avec ma redevance audiovisuelle.

Jean-Luc, tu as librement choisi le moment de partir.
Je ne serais pas étonné que ce moment coïncide avec ton souci des autres, de chaque membre de ta tribu, et jusqu’à ces chocolats pour celles et ceux que tu as connu ces 15 derniers jours.

Je ne cesserai jamais d’aimer penser à toi.

Roland

Nous sommes réunis aujourd’hui pour accompagner Odette.
Et entourer Benoit, Annie, Manon et Adrien.

Nous nous retrouvons ici, Boulevard Joseph Vallier.
Et c’est justement ici, de part et d’autre de ce boulevard grenoblois, que semblent s’organiser les différentes étapes de la vie d’Odette, née le XX août 19XX.

De ce côté-ci, les rues Nicolas Chorier et Abbé Grégoire, celles des années d’enfance avec un papa ch’ti, une maman italienne, et Gérard, le petit frère de 9 ans son cadet. Et puis les années d’adolescence pendant lesquelles Odette apprend, déjà, la couture.
Embauchée comme couturière aux Nouvelles Galeries, place Grenette… c’est là qu’elle rencontre Félicien…

Ensemble, ils traversent le Bd Vallier et c’est désormais aux Eaux Claires qu’ils installent leur vie de couple, et bientôt leur vie de famille avec la naissance de Benoit, le XX avril 19XX.
Odette a arrêté de travailler pour se consacrer pleinement à son fils.
Ensuite, elle ne cessera de s’occuper des enfants des autres pour les aider à grandir, notamment à la halte-garderie des Eaux claires.

Citadine, grenobloise, Odette aimait aussi ses ports d’attache en dehors de la ville.
Durant les années d’enfance à la ferme et dans la maison familiale de St Siméon de Bressieux.
Et au Puy, en Oisans. A Puy le Bas : à mi-chemin entre les Croix vieilles et Puy le haut.

C’est là que les B. ont bâti et agrandi leur chalet : le Wilderswil qui tient son nom d’un village suisse qu’ils avaient particulièrement aimé lors de leur voyage de noces.
C’est au Puy que Benoit et Annie se sont mariés, devant l’oratoire de Saint Sevran, face à la Meije et au Chambon, Annie dans sa robe de mariée taillée et cousue par Odette.
C’est au Puy, dans le jardin, que le bruit de la balle de ping-pong résonnait jusqu’à Pierre Courbe, tout près des pommiers dont on n’a jamais vu les pommes mûrir, parce que l’été est un peu trop court en Oisans.
C’est au Puy que tant d’enfants ont appris grâce à Odette à reconnaitre la confiture de cassis de la gelée, et avec Félicien comment on trie les myrtilles sur la rampe en bois qu’il avait conçue spécialement.
A une jeune étudiante qui recueillait son témoignage à l’Epahd à La Mure, Odette avait récemment confié que pour elle Le Puy a toujours été l’endroit où elle aimait recevoir du monde. Du monde venu d’Isère ou du Nord de la France, et même de Castelsarrasin.

Pour tant recevoir, il faut beaucoup donner.
C’est ce dont se souvient Nadine, collègue et amie d’Odette, avec qui elle a travaillé tous les jours pendant 19 ans : « c’était comme une mère pour moi, elle m’a appris et transmis tant de choses, elle m’accompagne tous les jours…elle a tellement donné ».

Ces jours-ci lorsque chacun de vous me parle d’Odette, ce sont les mêmes mots qui résonnent, comme une évidence : disponible, à l’écoute, présente, discrète.
Odette présente aux côtés de Félicien les jours heureux comme les jours difficiles… côté santé Félicien n’a pas été épargné.

Odette soucieuse de transmettre aux jeunes générations : avec ses collègues, ses amies, et sa famille.
Avec ce souci permanent de protéger les siens : combien de fois elle a eu peur pour son fils au passage du peloton cycliste, sans jamais lui faire part de cette peur pour ne pas le freiner dans sa passion.
Tant que le fiston mettait son tricot de peau pour pas être mouillé de chaud, tout allait bien…

Présence aussi durant toutes ces années vélo.
Odette et Félicien n’étaient pas passionnés de vélo ni de Tour de France, mais ils étaient bien là les week-ends au bord des routes qui sentaient l’huile camphrée sur les jambes rasées des cyclistes, pour voir les courses où couraient Benoît, et ses amis Fred et Jean-Philippe.
Pas pour encourager leur fiston en mode supporter, c’était pas leur genre, mais toujours présents, fidèles, pour le soutenir dans ses choix.

De cette présence généreuse, fiable et discrète qui vous accompagne longtemps.

Pour ses collègues et amie de travail, Odette est et reste aujourd’hui une référence.

Pour Annie elle est comme une maman, proche, complice… jamais intrusive.

Pour Manon et Adrien, elle est
la mamie qui les gâte,
la mamie rigolote avec qui ils aiment tant rire,
la mamie avec qui Adrien prend le tram pour la première fois,
la mamie couturière qui fabrique de ses mains la robe de baptême de Manon,
la mamie qui pense à une carte à chaque anniversaire,
la mamie aux meilleures bugnes et aux meilleurs flans qu’on puisse connaitre…

Pour Benoit, la maman unique d’un fils unique.

Pour reprendre les mots de Benoit, l’essentiel c’est de partager ces moments tout simples.
A cette école-là de la vie, chacun de nous repartira d’ici aujourd’hui, de part et d’autre du boulevard Joseph Vallier, le cœur plein de tout ce qu’Odette a donné sans compter.